Janvier 2017 : et si...

En ce début d'année 2014, je vous propose un exercice de style. Imaginons-nous dans trois ans à la même époque. Nous serons alors à quelques semaines, seulement, des élections présidentielles.

Le soir du 31 décembre 2016, François Hollande vient de prononcer ses vœux à tous les Français. Relativement décontracté, le Président de la République sortant s'est également montré résolument offensif, défendant son bilan depuis son élection à la tête du pays. Voici une retranscription de quelques passages de son allocution télévisée [1], regardée par 15 millions de Français.

"Mes chers compatriotes,
Alors que 2016 s'achève, je m'adresse à vous sereinement en ce 31 décembre et vous souhaite mes meilleurs vœux pour l'année qui s'annonce. J'espère qu'elle sera pour vous bonne et heureuse. Quant à moi, je me présente devant vous, ce soir, avec tous les espoirs que laissent apparaître les dernières nouvelles de l'économie de notre nation. Et je vais commencer par ce qui m'a tenu le plus à cœur pendant mon mandat, c'est-à-dire le chômage.
Tout comme moi, vous avez pris connaissance des derniers chiffres de l'emploi. Après les quatre années et demi d'efforts et de sacrifices que j'ai demandés à la population, les objectifs que nous avions fixés avec le gouvernement sont en passe d'être atteints. Je salue au passage le travail du Premier ministre Manuel Valls qui a mis en oeuvre des réformes audacieuses - je pense, surtout, à celle qui concerne la durée de travail hebdomadaire désormais fixée à 32 heures. Grâce à la ténacité dont nous avons fait preuve et au soutien de la population, le chômage régresse, maintenant, régulièrement depuis plus d'une année. D'ailleurs, je me rappelle que lors de mes précédents vœux je vous avais dit que l'année 2016 serait cruciale sur cette problématique. Ce soir, je peux vous dire que nous sommes en train de gagner la bataille contre le chômage, ce fléau qui mine notre pays depuis trop longtemps. Et même si le taux est encore très élevé - plus de 11% -, nous avons bon espoir, le gouvernement et moi, que cette baisse sera durable (...).
D'autres chiffres viennent également relever le moral en ce réveillon, je veux bien sûr parler de ceux de la croissance. Ce soir, je peux vous l'annoncer : elle sera supérieure à 1.7% cette année soit 0.2 point de mieux que ce que la prévision du gouvernement avait anticipé. Voilà encore une preuve que la reprise économique de notre pays est bien réelle et tangible, et qu'une nouvelle fois, les décisions que nous avons prises - contre l'avis de tous - étaient les bonnes (...).
Enfin, je tiens à vous faire part d'une dernière bonne nouvelle à savoir que les comptes publics du pays sont désormais redressés, conformément à ce que j'avais annoncé pendant ma campagne électorale. Cette année, le déficit public s'établit  - en première approximation - à 1.2% du PIB et la dette a été réduite à 92% du PIB. Et ce n'est qu'un début : l'effort concernant les finances du pays se poursuivront encore cette année (...).
L'emploi revenu, les finances de l'état stabilisées et la croissance retrouvée, voici les trois piliers solides sur lesquels le gouvernement s'appuiera pour continuer à réformer jusqu'aux ultimes moments du temps parlementaire, avant que le temps électoral lui laisse la place pour les deux échéances que vous connaissez et au cours desquelles vous aurez à vous exprimer. A cette occasion et en accord avec la majorité, je solliciterai de votre part un nouveau mandat afin de poursuivre mon travail à la tête du pays, qui, comme je viens de vous l'annoncer, commence à porter ces fruits. Il n'est pas question pour moi de renoncer alors qu'il reste tant à faire !
Dans les semaines à venir, je vous annoncerai les réformes que je souhaite porter si toutefois vous continuez à m'accorder votre confiance.
Quoi qu'il en soit, je vous renouvelle mes meilleurs vœux pour l'année qui vient.
Vive la République et Vive la France !"

A peine diffusée, cette allocution a été vivement commenté à la fois par la majorité socialiste sortante et l'opposition, toutes deux sur le pied de guerre à quelques encablures de la présidentielle et des législatives. A gauche, certains y voient "la victoire des idées de François Hollande et de sa ténacité à ne pas vouloir changer de cap au cours de sa mandature". Le Premier Ministre, invité du journal de 20h le lendemain, a déclaré que "la volonté du gouvernement était inébranlable" et que "c'était là, la source de l'amélioration économique que nous connaissons". Même si certaines idées phares du début ont été abandonné en cours de mandature - on pense notamment à la taxe à 75% qui n'a pas rapporté les recettes fiscales escomptées - le gouvernement "est convaincu d'avoir rendu la France plus forte à travers cette crise", qui se trouve "maintenant dernière nous". Concernant l'annonce de la candidature de François Hollande, Manuel Valls a avoué être au courant depuis "quelques semaines" de la décision du président et est prêt à "le soutenir à 100%".

L'opposition, de son côté, voit dans le redressement du pays "le simple effet de la conjecture européenne" dont l'économie est tirée par le couple germa-britannique [2] : les deux premières puissances affichent, en effet, une croissance de presque 4% et un chômage à moins de 6%. Bruno Le Maire, le candidat désigné par l'UMP et le centre en novembre dernier, lors du congrès réunissant les principales formations de l'opposition, a d'ailleurs critiqué ces chiffres considérant, je cite, "que le wagon France reste à la traîne du train Europe et de la locomotive germano-britannique". Poursuivant sur sa lancée, celui qui pourrait devenir le plus jeune Président de la République [3], a également dénoncé l'attitude du président sortant qui a utilisé "comme tribune politique un moment solennel alors qu'il aurait dû, au contraire, apaiser et rassembler la population". Interrogé sur Twitter par un internaute, Bruno Le Maire a annoncé qu'il présenterait son programme de campagne "à la fin du mois de janvier" et que celui-ci serait "en rupture totale avec ce qui a été vu ces dernières décennies". 

L'autre grande figure de l'opposition à François Hollande, à savoir Marine Le Pen a pointé les effets pervers de la politique de François Hollande qui, selon elle, "affame les plus précaires et les travailleurs du pays, les mêmes qu'il y a cinq ans, sauf qu'ils sont plus nombreux désormais". Selon elle, "aucun problème n'est résolu" puisque "l'Euro continue d'affaiblir le pays". Celle qui sera candidate pour la deuxième fois a également déclaré "comprendre l'attitude de l'Allemagne qui cherche à créer avec le Royaume-Uni un nouvel espace d'entente économique", révélant au grand jour "la défaite de la monnaie unique, un boulet que l'on traîne au pied depuis près de 20 années maintenant". A la tête d'un grand rassemblement dans lequel on trouve quelques dissidents de l'UMP, la maire adjointe de la commune d'Hénin-Beaumont semble aussi surfer sur la vague de cette reprise économique puisque la candidate naturelle de la droite populaire [4] est crédité de plus de 24% des intentions de sondage au premier tour, en constante augmentation depuis septembre. Ces résultats la confortent dans son espoir d'être "au deuxième tour".

Alors que les sondages semblent encore favorables au président sortant - même s'ils sont en baisse depuis l'entrée en lisse des divers candidats -, la gauche, toujours habitée par le souvenir du 21 avril 2002, prend la menace Marine Le Pen très au sérieux. Aussi, le PS et EELV semblent vouloir une union dès le premier tour comme vient de le faire la droite. En tenant compte de l'actuel rapport de forces politiques, les candidats dissidents - parmi lesquels on retrouve l'ancien socialiste Gérard Filoche qui "ne se reconnait plus dans cette gauche" - ne devraient se partager que les miettes au prochain scrutin électoral puisque son parti, La Vraie Gauche, une émanation du défunt Front de Gauche, ne rassemble pour l'instant que moins de 5% des intentions de vote.

En attendant, il semblerait que François Hollande tienne la corde au premier tour, avec 27% des votes tout juste devant Bruno Le Maire crédité lui de 26% mais qui a du mal à rassembler derrière lui l'opposition, malgré le récent ralliement de l'ancienne candidate à la mairie de Paris, Nathalie Kosciusko-Morizet, après sa défaite à la primaire de droite face à lui. Pour beaucoup d'observateurs, l'échec du retour de Nicolas Sarkozy [5] constitue un obstacle que l'ancien ministre de l'agriculture aura des difficultés à surmonter, les électeurs de droite le trouvant trop consensuel - notamment sur les questions européennes - et pas assez sûr de lui.

Mais pour connaître le vainqueur de cette course folle, il faudra attendre mai 2017.

---
[1] Allocution purement fictive. Quoique...
[2] Que certains journalistes n'hésitent pas à qualifier de "Big Bertha". La complicité affichée entre David Cameron et Angela Merkel, semble avoir relégué la France au second rang des nations européennes.
[3] A quelques mois près, il devancerait Valéry Giscard d'Estaing.
[4] Marine Le Pen refuse l'étiquette "extrême-droite" et l'a fait savoir à de nombreuses reprises par voie de presse.
[5] M. Sarkozy avait préféré se retirer de la course à l'investiture de l'UMP sous la pression de certains ténors du parti. Et sa tentative de présenter une candidature dissidente, a été étouffée dans l’œuf par un manque de soutiens politiques.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire