"Il y a dans cette société une majorité de femmes et il y en a qui sont pour beaucoup illettrées. On leur explique "vous n'avez plus d'avenir à GAD ou aux alentours, allez travailler à 50 ou 60 km". Ces gens-là n'ont pas le permis de conduire ! On va leur dire quoi ? "Allez passer le permis de conduire, allez attendre un an"? Ça ce sont des réformes du quotidien."
Cette déclaration, faite hier matin par le nouveau ministre de l'économie, Emmanuel Macron, alors qu'il était interrogé sur le sort des salariés des usines GAD en Bretagne, a suscité l'indignation sur les réseaux sociaux - Twitter en tête - pendant une bonne partie de la journée. Rapidement accusé de "mépris" envers les petites gens employés dans cette entreprise, M. Macron a été contraint, sous la pression médiatique, de s'excuser dans la soirée. Un faux pas pour le jeune ministre, lui qui à peine nommé par Manuel Valls, avait déjà dû essuyer les attaques de la presse et d'une partie des responsables politiques concernant son parcours professionnel : diplômé de l'ENA et ancien collaborateur d'une grande banque, il n'était pas l'incarnation de la gauche luttant contre la "finance". Cette remarque du ministre vient renforcer cette impression, en plus d'être désastreuse pour la majorité au pouvoir, déjà affaiblie quelques temps auparavant par l'affaire des "sans-dents", expression par laquelle François Hollande désignerait les plus modestes des Français [1].
Cette longue succession de malentendus, de déclarations à l'emporte-pièce et de reculades systématiques devant les obstacles, a, petit à petit, envenimé les relations entre l'exécutif et la population depuis le début du quinquennat. Et si on ajoute à cela les mauvais chiffres économiques, c'est la goutte qui fait déborder le vase.
Pourtant, j'ai ici envie de prendre la défense d'Emmanuel Macron. Bien que maladroits sur la forme, ses propos n'en reflètent pas moins une vérité criante qui peut se résumer en un chiffre : aujourd'hui, en France, environ 7% de la population souffre d'illettrisme [2], autrement dit, éprouve des difficultés à déchiffrer des textes ou à écrire. Pour l'entreprise GAD, cette statistique grimpe à 20%. Dès lors, dire que le ministre de l'économie a insulté ces salariés est un contresens : il n'a fait qu'énoncer une vérité souvent ignorée par la classe politique.
La question n'est donc pas de savoir si Emmanuel Macron a fait une erreur en disant cela, mais de trouver des solutions pour remédier au problème de illettrisme en France. A la vue des chiffres de l'entreprise GAD, le Gref de Bretagne a tenté de réagir en proposant une série de formations, afin d'aider les salariés à acquérir ou réacquérir les savoir-faire fondamentaux. Car, au final, ces personnes sont confrontées, tous les jours, dans ou en dehors de leur travail, à des factures, des contrats, des panneaux de signalisation, etc. autant d'écueils qui deviennent une torture quand on ne maîtrise pas la lecture et l'écriture. Un véritable handicap qui leur interdit, aussi, de pouvoir aider leurs enfants à faire leurs devoirs ou d'avoir accès à la culture.
Sur un plan plus économique, l'illettrisme a des conséquences encore plus regrettables, comme l'a d'ailleurs fait remarquer le ministre. Comment ces personnes gens, privées de connaissances élémentaires en lecture et en écriture, peuvent obtenir et réussir des formations professionnelles ou se reconvertir après la perte d'un emploi ? Impossible avec de telles lacunes. Confrontés à cette situation, les illettrés se retrouvent le plus souvent dans le cul-de-sac de Pôle Emploi, ayant peu de compétences et une maigre expérience à faire valoir auprès d'un employeur. Les plus débrouillards peuvent espérer trouver des petits boulots, mais pour les autres, se sentant exclus de la société et honteux de leur condition, retrouver un emploi capable de subvenir à leurs besoins relève du parcours du combattant. Et qui dit chômage de longue durée, dit vie précaire et pauvreté. Un cercle vicieux.
Au regard des milliards d'euros dépensés chaque année par le pays dans l'éducation et la formation professionnelle, cette situation semble bien incompréhensible. A cet égard, l'état a montré ses limites en ne parvenant pas à éradiquer ce mal. Pire encore, les résultats de la France aux tests PISA, réalisés dans les pays de l'OCDE, montrent que le problème semble s'étendre, puisque de plus en plus d'enfants sortent du cursus primaire sans maîtriser l'écriture et la lecture : un retard qu'il sera difficile de combler par la suite et qui provoquera, à brève échéance, leur sortie du milieu scolaire sans formation ni diplôme. L'échec scolaire perpétuel. Pourtant les différents ministres qui se succèdent à l'Hôtel de Rochechouart [3] ne paraissent pas préoccupés par cela, oubliant au passage que sans ce socle, aucune autre connaissance ne pourra être acquise par les enfants.
Espérons quand même que les propos de M. Macron auront permis à certains de prendre conscience de l'ampleur du problème - même si j'ai peu d'espoir - et des efforts à consentir pour y remédier, à la fois sur les méthodes d'enseignement (le retour à la méthode syllabique, etc.), mais aussi sur le statut des écoles (à qui il faut donner plus d'autonomie) et de leur personnel (recrutement, salaires plus élevés). Plus de liberté et moins de dirigisme associés à quelques réformes permettraient à l'éducation de retrouver la voie de l'excellence, seul véritable moyen de réduire durablement les inégalités et la pauvreté dans le pays.
La question n'est donc pas de savoir si Emmanuel Macron a fait une erreur en disant cela, mais de trouver des solutions pour remédier au problème de illettrisme en France. A la vue des chiffres de l'entreprise GAD, le Gref de Bretagne a tenté de réagir en proposant une série de formations, afin d'aider les salariés à acquérir ou réacquérir les savoir-faire fondamentaux. Car, au final, ces personnes sont confrontées, tous les jours, dans ou en dehors de leur travail, à des factures, des contrats, des panneaux de signalisation, etc. autant d'écueils qui deviennent une torture quand on ne maîtrise pas la lecture et l'écriture. Un véritable handicap qui leur interdit, aussi, de pouvoir aider leurs enfants à faire leurs devoirs ou d'avoir accès à la culture.
Sur un plan plus économique, l'illettrisme a des conséquences encore plus regrettables, comme l'a d'ailleurs fait remarquer le ministre. Comment ces personnes gens, privées de connaissances élémentaires en lecture et en écriture, peuvent obtenir et réussir des formations professionnelles ou se reconvertir après la perte d'un emploi ? Impossible avec de telles lacunes. Confrontés à cette situation, les illettrés se retrouvent le plus souvent dans le cul-de-sac de Pôle Emploi, ayant peu de compétences et une maigre expérience à faire valoir auprès d'un employeur. Les plus débrouillards peuvent espérer trouver des petits boulots, mais pour les autres, se sentant exclus de la société et honteux de leur condition, retrouver un emploi capable de subvenir à leurs besoins relève du parcours du combattant. Et qui dit chômage de longue durée, dit vie précaire et pauvreté. Un cercle vicieux.
Au regard des milliards d'euros dépensés chaque année par le pays dans l'éducation et la formation professionnelle, cette situation semble bien incompréhensible. A cet égard, l'état a montré ses limites en ne parvenant pas à éradiquer ce mal. Pire encore, les résultats de la France aux tests PISA, réalisés dans les pays de l'OCDE, montrent que le problème semble s'étendre, puisque de plus en plus d'enfants sortent du cursus primaire sans maîtriser l'écriture et la lecture : un retard qu'il sera difficile de combler par la suite et qui provoquera, à brève échéance, leur sortie du milieu scolaire sans formation ni diplôme. L'échec scolaire perpétuel. Pourtant les différents ministres qui se succèdent à l'Hôtel de Rochechouart [3] ne paraissent pas préoccupés par cela, oubliant au passage que sans ce socle, aucune autre connaissance ne pourra être acquise par les enfants.
Espérons quand même que les propos de M. Macron auront permis à certains de prendre conscience de l'ampleur du problème - même si j'ai peu d'espoir - et des efforts à consentir pour y remédier, à la fois sur les méthodes d'enseignement (le retour à la méthode syllabique, etc.), mais aussi sur le statut des écoles (à qui il faut donner plus d'autonomie) et de leur personnel (recrutement, salaires plus élevés). Plus de liberté et moins de dirigisme associés à quelques réformes permettraient à l'éducation de retrouver la voie de l'excellence, seul véritable moyen de réduire durablement les inégalités et la pauvreté dans le pays.
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[1] Selon les dires de son ex-compagne Valérie Trierweiler.
[2] D'après les chiffres de l'INSEE en 2013 et repris par Le Parisien à ce lien. L'illettrisme avait été désigné grande cause nationale.
[3] Le siège du ministère de l'Education Nationale.
[2] D'après les chiffres de l'INSEE en 2013 et repris par Le Parisien à ce lien. L'illettrisme avait été désigné grande cause nationale.
[3] Le siège du ministère de l'Education Nationale.
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